2.4 - Capacité instantanée, annuelle, journalière

mise à jour: 01/01/1999

 

En fonction des caractéristiques du milieu naturel et de ses contraintes de régénération, en fonction aussi des préoccupations de gestion de la fréquentation, la capacité d'accueil est à considérer à des échelles de temps différentes. On pourra ainsi distinguer :
- la capacité d'accueil «en instantané» d'un site, c'est-à-dire le nombre de personnes que le site peut accueillir en un instant donné
- la capacité journalière
- la capacité annuelle.

La capacité instantanée d'un site sera en lien direct avec la programmation des équipements d'accueil : parking, centres d'information. Le dimensionnement des équipements sera une conséquence des niveaux de fréquentation souhaités ; et en retour, les contraintes d'implantation des équipements dans le site (localisation, distance au site, impact visuel et écologique) en détermineront la taille et, partant, le nombre maximal de visiteurs susceptibles d'accéder en même temps au site.
De la capacité instantanée estimée pour un site, dépend directement le confort du visiteur et l'intérêt de la visite.

Une réflexion sur le nombre de visites annuelles est importante pour évaluer les capacités de régénération des milieux ou la perturbation relative des écosystèmes : au delà d'un certain nombre annuel de visiteurs, quelles que soient les précautions prises, l'herbe ne repousse plus sur la Pointe du Raz, ou les isards désertent définitivement tel vallon de la réserve du Néouvielle. Généralement, cette détermination d'une capacité annuelle sera à compléter par une mesure de la saisonnalité de la fréquentation et à accompagner de mesures appropriées pour «n'ouvrir» le site que pendant un laps de temps compatible avec sa régénération, un peu comme il y a des heures d'ouverture de tel monument ou de tel jardin. En zone de montagne, on peut ainsi décider de déneiger ou au contraire de ne pas déneiger un col...

Une réflexion sur la capacité journalière est importante pour adapter au mieux les services nécessaires aux visiteurs: le nombre de personnes présentes à l'accueil ou à la sécurité, la fréquence de nettoiement du site ou d'enlèvement des déchets, etc ... La capacité journalière se raffine en évaluation des heures creuses et des heures de pointe, et permet un ajustement du potentiel d'accueil (gestion de parkings d'appoint, capacité, fréquence et horaires des navettes, etc.).
La capacité journalière peut également dépendre du niveau de tolérance de la population permanente : ainsi par exemple, au delà de l'accès de X voitures par jour, les riverains d'un site pourront subir une nuisance jugée insupportable.

C'est donc bien non pas une, mais trois capacités d'accueil (instantanée, journalière et annuelle) qu'il faudra déterminer pour mettre au point le projet de réhabilitation et de gestion d'un site.

De surcroît, il pourra y avoir une contradiction apparente entre les trois estimations obtenues. Si l'on détermine une capacité d'accueil instantanée relativement faible, on dimensionnera les parkings en un nombre de places réduit ; mais si le confort de la visite en est amélioré, la rotation des visiteurs sera accélérée, et au bout du compte, la capacité journalière ne diminuera pas dans les mêmes proportions, stagnera, voire augmentera légèrement, ce qui pourrait avoir des conséquences sur la conservation ou l'évolution de l'économie locale : piétinement moins désordonné, mais plus constant, commerces s'orientant plus vers la buvette que vers la restauration ...
De même, une politique réussie d'étalement des visites, ce qui n'est pas hors de portée d'un site proche d'une grande ville, sous entend une volonté de diminuer les capacités d'accueil journalière et instantanée : cela peut entraîner une augmentation de la capacité d'accueil annuelle qui n'est pas forcément souhaitable, ni pour le milieu, ni pour la société locale (des boutiques de souvenirs supplantant définitivement le commerce traditionnel... ).

La fréquentation annuelle d'un site est l'indicateur le plus souvent retenu pour juger de son effet sur l'économie locale. Or, c'est un indicateur bien réducteur, dans la mesure où au delà d'un certain niveau, l'économie locale n'est plus en mesure de répondre à la demande. Ainsi, il sera parfois possible de plaider pour une diminution sensible de la capacité instantanée, contre son meilleur étalement sur l'année.



Évaluer la capacité instantanée d'un site : la méthode de la « journée-type »

Le nombre de visiteurs présents sur un site à tel ou tel moment est le produit de deux facteurs :
- la courbe des arrivées sur le site au cours de la journée
- la durée moyenne du séjour sur le site.
Le croisement de ces deux données permet d'obtenir une estimation des visiteurs présents à un moment donné sur le site, et de cerner ainsi à quels moments la capacité instantanée est dépassée.
Graham Barrow conseille de procéder à cette évaluation en prenant comme référence une « journée type » de la vie d'un site.

«La capacité instantanée d'un site peut constituer le fondement d'une évaluation très pertinente de la pression exercée par les visiteurs d'un site. Il faut pour cela emprunter leur vocabulaire aux concepteurs  d'expositions, pour ce qui est des normes de visites. Beaucoup de ces concepteurs commencent par déterminer le chiffre des visites pour une journée-type. Une journée-type correspond aux jours de l'année au cours desquels le site va être à pleine capacité à un moment ou à un autre de la journée. Ne sont pas inclus les jours réellement surchargés, soit les deux ou trois fois par an (les jours fériés du mois d'août, par exemple), durant lesquelles les concepteurs acceptent que l'exposition soit sursaturée. Des dispositions temporaires peuvent être prises lors de ces journées, et il serait absurde de concevoir toute l'exposition en fonction d'une ou deux journées dans l'année.
On sait par expérience que l'on retrouve le chiffre de la joumée-type environ 20 fois par an et que chacune de ces journées représente 1 % à 2 % du nombre annuel de visiteurs sur un site. Cependant, si nous cherchons à établir le schéma d'une journée-type, c'est pour calculer dans le site le nombre de visiteurs journaliers pour lequel la capacité instantanée n'est dépassée à aucun moment de la journée. On note que les visites journalières dans un site donné peuvent être réparties sur toute l'année et que le chiffre de la journée-type est dépassé au cours des fêtes du mois d'août. C'est le problème que doivent affronter la plupart des gestionnaires de sites. L'une des solutions est la réduction du nombre total des visiteurs du site. Une solution plus constructive est de s'inspirer de la méthode des concepteurs d'expositions et de répartir la charge de manière efficace».



Extrait de : Graham Barrow « Répartir la charge », op. cit.