3.4 - Le Pont d'Espagne - Hautes-Pyrénées

mise à jour: 01/01/1999

 

Le site

L'accueil du public et les formes de régulation des flux

L'aménagement du site dans le respect de l'esprit des lieux

La structure et les moyens de gestion

Les retombées économiques et le partenariat local

Conclusion

Le site

Le site du Pont d'Espagne est d'abord et anciennement une « curiosité pittoresque ». Il doit son nom et sa renommée à un pont enjambant le Gave de Gaube, à l'aplomb d'une cascade. Il fait partie, avec Gavarnie, des excursions classiques des Pyrénées.


C'est aussi le domaine de ski de fond de Cauterets (1 200 habitants permanents, 20 000 lits touristiques), station réputée par ailleurs pour son domaine de ski alpin et ses thermes.

Le site du Pont d'Espagne a fait récemment l'objet d'une importante opération de réhabilitation, à l'initiative des collectivités locales. En effet, le site, en cul de sac, connaissait un véritablement envahissement par la voiture, avec 2 700 voitures et 9 000 visiteurs les jours de pointe d'été, engendrant des dégradations importantes du site, situé en zone centrale du Parc national des Pyrénées, rebaptisé « Le Pont d'Enfer ».

L'étude de programmation préalable à la réhabilitation fournissait un diagnostic sévère : « Le site se caractérise par un moindre projet économique: le système fonctionne à peu de frais pour le gestionnaire et avec un minimum d'emplois ; en contrepartie, l'accès au site et à la plupart des activités sont gratuites, moyennant quoi la clientèle est peu exigeante sur la qualité des prestations. galement un moindre profit culturel et écologique : bien plus que la surfréquentation, c'est l'absence de gestion de cette fréquentation qui doit être mise en cause dans les atteintes ponctuelles dont est victime la végétation sur certains sites sensibles».

La réhabilitation du site, d'un montant de 35 MF, a comporté :

- la coupure de la route bien avant le Pont d'Espagne lui-même, où sont regroupés les parkings

- la création d'une porte d'entrée du site : parking, accueil, locaux techniques, départ des sentiers

- la création d'un téléporté dans le site, préféré pour son caractère réversible sans atteintes au site, à une navette routière qui aurait nécessité la réfection de la route d'origine

- la mise en place d'une structure de gestion du site

Caractères généraux
  • situé sur la commune de Cauterets, à 7 km environ du centre de Cauterets
  • caractères physiques: situé à 1 496 mètres d'altitude, dans un paysage pyrénéen marqué par l'importance des estives maintenant un paysage ouvert et la forêt.
  • fréquentation : été: 500 000 visiteurs hiver : 150 000 visiteurs (ski de fond)
  • statut de protection : zone centrale du Parc national des Pyrénées
  • Site classé au titre de la loi de 1930
  • statut foncier :
    appartient en totalité à la Commission syndicale de la Vallée de Saint Savin, établissement public très spécifique aux vallées des Pyrénées


L'accueil du public et les formes de régulation des flux

Deux éléments sont à noter :

- la capacité de stationnement a été légèrement réduite. Alors que le site avait absorbé auparavant des pointes pouvant aller jusqu'à 1 600 voitures et 20 cars, le parking comporte aujourd'hui 1 500 places. Le stationnement sauvage est impossible et le parking a été implanté dans un lieu où il ne pourra pas être agrandi.

Lorsque le parking est plein, ce qui est arrivé à cinq reprises depuis sa création, le gestionnaire du site ferme la route d'accès. Du personnel du site descend sur la route de Cauterets, informe chaque automobiliste et les dirige vers d'autres sites

- un service de navettes (bus) a été créé entre Cauterets et le site (7 km).

Il a été confié à un opérateur privé qui reverse une redevance annuelle à l'organisme gestionnaire du site.
La seule gestion du site nécessite 26 équivalents plein-temps sur l'année en majorité mobilisés sur l'accueil du public.

Trois établissements commerciaux sont implantés de très longue date dans le site : un café-restaurant ; un café-restaurant-hébergement de groupes (46 lits) ; un hôtel-restaurant de 14 chambres. Tous trois sont propriétés de la Commission syndicale (murs). Pour l'instant, ces établissements, vétustes, n'ont pas fait l'objet de travaux de réhabilitation. Si l'un d'eux, récemment installé, se sent partie-prenante du projet, les deux autres, plus âgés, en restent assez extérieurs.

 

L'aménagement du site dans le respect de l'esprit des lieux

Le parti d'intervention sur le site a été différent suivant les niveaux de sensibilité du site et les niveaux de pression touristiques qui s'y exercent.
Il distingue en effet  deux zones :

-le coeur du site, englobant la zone d'accueil et le Pont d'Espagne proprement dit, aménagée autour du concept de « jardin de montagne », engendrant un type d'aménagement « construit » et architecturé ; ces qualificatifs s'appliquent aux différents bâtiments et ouvrages, amis également aux espaces « naturels, forêts, - landes et pelouses dont les techniques d'aménagement et d'entretien relèvent davantage de l'horticulture que de la sylviculture classique

- la périphérie, pratiquement pas aménagée, avec une fonction touristique orientée vers la randonnée et l'approche de la Haute montagne.

Il n'en reste pas moins que la réhabilitation s'est traduite par une construction lourde sur le site. Si la qualité du projet et de son exécution n'est pas en cause, sa présence dans le site dont il « barre » l'approche est particulièrement imposante. Le projet initial, au vu duquel les autorisations ministérielles d'intervention en site classé ont été délivrées, prévoyait un paysagement conséquent du parking, limitant son impact visuel. Ces plantations de haies n'ont pas été réalisées à ce jour.

 

La structure et les moyens de gestion

Il s'agit là d'un aspect particulièrement intéressant de ce cas.

Une société d'économie mixte a été créée pour assurer la maîtrise d'ouvrage de l'opération, dont 44 % du coût a été financé par emprunt de la SEM.

Depuis sa réhabilitation, le site est géré par « Espaces Cauterets », régie communale de la ville de Cauterets, chargée de toute l'activité touristique de Cauterets. Le fait qu'un grand site naturel soit géré par un opérateur est relativement rare. C'est le signe que ce site naturel est aujourd'hui totalement intégré à la politique touristique de Cauterets et à sa politique d'image.

Propriétaire Maîtred'ouvrage
S.E.M
Gestionnaire
Commission
syndicale de
la Vallée
St Savin
Commune 34 % Espaces
Cauterets
  CSVSS 34 %  
  Espaces C. 10%  
  EDF 10 %  
  ONF  
  particuliers  

 

Dès l'origine du projet, le principe de l'autofinancement du fonctionnement du site a été retenu. Celui-ci est en effet entièrement financé par les usagers du site, c'est-à-dire ses visiteurs qui paient des services ou des redevances pour des activités (vignette ski de fond).

Espaces Cauterets paie une redevance à la SEM, pour l'exploitation du site, correspondant au montant du remboursement des annuités d'emprunt. C'est donc en fait Espaces Cauterets qui a pris le risque de l'opération au plan économique.

Le financement de l'opération

Subventions
Région Midi-Pyrénées    4,40 MF
Département                3,40 MF
Europe                         3,80 MF
État                             5,20 MF
Agence de l'eau            0,70 MF

Autofinancement           1,50 MF
Emprunt sur 12 ans      15,50 MF

 

   

Données-clés sur le budget de gestion 1996 (Espaces Cauterets)
Dépenses HT Recettes HT
Total       7,40 MF Recettes d'expl.  6,5 MF
dont dont
personnel  2,90MF
charges
d'expl       1,10MF
annuités
d'emprunt 1,10MF
redevance
SEM          2,40MF

 
parking             23,6 %
remontées
mécaniques         40 %

téléporté           16,4 %
redevance
ski de fond          19 %
La première année d'ouverture du site dans la nouvelle configuration fait appa raître un excédent d'exploitation.
Le déficit (- 0,95 MF) apparaissant au bilan est du au montant élevé de la redevance versée à la SEM pour le remboursement de ses emprunts. Un rééchelonnement des annuités est intervenu à partir de 1997.


Les retombées économiques et le partenariat local

On a vu que le partenariat local a été particulièrement fort sur ce site. A la différence de nombreuses Opérations grands sites où l'administration centrale du Ministère de l'environnement est fortement moteur, le projet a été ici souhaité, conçu et géré localement par les collectivités locales et le Parc national des Pyrénées.

La mobilisation de l'opérateur touristique de Cauterets (Espaces Cauterets) dans le projet témoigne de la place prépondérante qu'a eu la revalorisation du site aux yeux du public, et l'amélioration des conditions d'accueil.
Espaces Cauterets estime qu'aujourd'hui l'attractivité du Pont d'Espagne génère 30 % des « journées touristiques » en hiver et la quasi totalité de l'économie touristique locale (hors thermalisme) en été. C'est dire l'enjeu que représente un tel site. L'Office du tourisme de Cauterets communique largement sur le Pont d'Espagne : « au Pont  d'Espagne, moi j'estime la nature » , « Pont d'Espagne, grimpez dans l'estime de la nature » .


Conclusion

Le nouveau dispositif répond aux problèmes posés par une fréquentation de masse sur un site fragile. La gestion du site satisfait tout à la fois le Parc national des Pyrénées et les visiteurs auprès desquels des enquêtes de satisfaction sont régulièrement menées.

Son mode de gestion, de type commercial bien qu'assuré par une structure publique, contribue à inscrire le site dans une économie locale montagnarde.

Du point de vue des aménagements réalisés dans le site, cet exemple, de même que celui de la Pointe du Raz
 avec lequel il a beaucoup de points communs, s'apparente à un « équipement public lourd ».

C'est le cas, tant à l'échelle du site naturel (taille imposante des bâtiments, réalisés en pierre, aménagement des parkings, etc.), qu'à l'échelle plus large d'une région rurale et d'une économie locale.
Ces aménagements vont dans le sens d'une meilleure gestion des sites. Mais n'existerait-il pas (ou n'existera-t-il pas dans le futur) une alternative à ces équipements lourds des sites, aussi réussis soient-ils ?