3.1 - La Vallée de la Boyne - Irlande

mise à jour: 01/01/1999

 

Le site

L'accueil du public et les formes de régulation des flux

L'aménagement du site dans le respect de l'esprit des lieux

La structure et les moyens de gestion

Les retombées économiques et le partenariat local

Conclusion


Le site

Dans les boucles de  la rivière Boyne, il s'agit, sur plus de 3 000 ha, d'un site archéologique de première importance.Le site se caractérise par la combinaison :


- de tombes à galeries néolithiques, classées au Patrimoine mondial. La tombe la plus célèbre, Newgrange, a été mise au jour en 1960

- d'un site de vallée, pittoresque, au caractère agricole et naturel encore assez préservé, au coeur duquel se situent les vestiges.

Les désordres liés à la notoriété du site sont apparus au milieu des années 80. De façon évidente, il n'était plus possible de laisser entrer un nombre illimité de visiteurs dans la tombe de Newgrange, avec son entrée étroite et sa petite galerie. Les abords de la tombe connaissaient des problèmes d'érosion qui mettaient en péril l'édifice. La tranquillité et le charme de la boucle

de la Boyne étaient troublés par les  files de voitures et les roulottes de commerçants qui s'installaient au bord de la route en saison.

Caractères généraux du site

Situé dans le Comté de Meath, au Nord-Est de l'Irlande, à 40 km de Dublin

- caractères physiques : site archéologique dans la Vallée de la Boyne, sur 3 000 ha environ.

- fréquentation
1984 : 78 000 visiteurs
1989 : 130 000 visiteurs
1996 : 200 000 visiteurs

- statut de protection
Protections nationales fortes. Figure également au schéma régional de protection
Site du patrimoine mondial en 1993

- statut foncier essentiellement privé (agriculture).
L'État ne possède que 5 % du site environ, c'est-à-dire le strict emplacement des tombes.


L'accueil du public et les formes de régulation des flux

Le site a connu un accroissement fort de sa notoriété et de sa fréquentation, qui atteint aujourd'hui 250 000 personnes environ. Cette fréquentation consiste d'abord dans la visite des vestiges, mais aussi en des activités de loisirs telles que la randonnée et la pêche dans la Boyne.

La pression sur le site, la fragilité des vestiges et leur dispersion au milieu des champs a amené les pouvoirs publics à engager une politique active de protection et de gestion du site.
La gestion de l'accueil du public a été très pensée dans la Vallée de la Boyne. Elle est particulièrement intéressante en ce qu'elle combine des stratégies complémentaires qui, de l'avis du gestionnaire, ont permis de réduire les effets néfastes sur le site d'une pression concentrée et jusque là mal maÎtrisée.

La création d'un centre d'accueil, ouvert en 1997 :
Ce centre d'accueil est situé à 2 km du premier tumulus visitable. Par sa localisation et son implantation, ce centre d'accueil fonctionne comme la « porte d'accès » au site :
- parking
- billetterie
- information sur le site
- information sur l'ensemble de la région et réservation hôtelière
- musée proposant des expositions permanentes et temporaires sur le site
- boutique
- café-restaurant, géré par un concessionnaire
- services (toilettes, téléphones ... )
- point de départ de sentiers cheminant vers les sites
- départ des minibus qui desservent les sites (6 bus de 25 passagers, la chauffeurs en haute saison).
L'accès au site est payant, les tickets étant vendus au centre d'accueil. Le ticket inclut le parking.

La diversification de l'offre en fonction des publics : c'est la fonction principale du centre d'accueil, faisant office de « filtre » et considéré par les gestionnaires comme leur outil le plus efficace de gestion de la fréquentation. Tous les visiteurs doivent en effet passer par le centre où ils achètent leur ticket d'accès ( « l'évasion » est faible, estimée à 4 % environ des visiteurs qui vont aux sites sans passer par le centre). Y sont proposées des « options de visites » en fonction du temps dont disposent les visiteurs, avec des prix de visites différents.

15 % des visiteurs se contentent de la seule visite du centre d'accueil


Le centre d'accueil a été particulièrement soigné du point de vue de son implantation (offrir un beau panorama, et être le moins visible possible dans le site), et du point de vue muséographique afin d'offrir aux visiteurs qui n'iront pas jusqu'aux tombes elles mêmes une visite néanmoins suffisamment riche. Ainsi par exemple, le parti a-t-il été pris de présenter au musée un fac-similé d'une des tombes.

L'étalement de la pression sur un espace plus grand : l'interdiction faite aux voitures et aux cars d'aller près des tombes, la construction du parking et du centre d'accueil à 2 km de Newgrange, ont rallongé les temps d'accès aux sites. Ceci contribue sans doute à ce qu'une partie des visiteurs (15 %) se limite à la visite du musée et de la réplique au centre d'accueil (le mauvais temps les y encourageant aussi).

Le développement de sites alternatifs : à l'origine, seule Newgrange était ouverte au public. Aujourd'hui, Knowth, située à 1 km, est ouverte de Mai à Octobre, de façon à « soulager » Newgrange tout en évitant de refuser l'entrée du site aux heures de pointe : « Le public n'aime pas se voir refuser l'entrée d'un site. On peut leur dire : « Newgrange est plein, mais vous pouvez aller à Knowth » . Le public le comprend et n'a pas le sentiment d'être venu pour rien ».

La modulation des prix : l'accès au site majeur, Newgrange, est légèrement plus cher que les autres tumulus, de façon à « décourager » sa visite et encourager la découverte de vestiges moins connus.

Les réservations obligatoires :
- réservation obligatoire pour les groupes de plus de 15 personnes
- en haute saison (de juin à août) toute visite avant 14 heures se fait sur réservation
- réservation pour des événements particuliers : par exemple la visite d'un des Tumulus au solstice d'hiver dans des conditions particulières de luminosité réunies seulement quelques jours par an (réservations complètes sur 10 ans !)

La fermeture des sites fragiles : Si 2 sites sont ouverts au public, la Vallée de la Boyne comporte en réalité plus de 50 monuments dont la visite est interdite. Ces interdictions sont difficiles à contrôler : étendue du site et dispersion des vestiges, terrains privés, volonté de ne pas couper de routes qui servent également aux agriculteurs, etc ... L'absence de signalisation de ces sites d'une part et les efforts consentis sur les deux sites ouverts restent les instruments de dissuasion les plus efficaces.

  durée
de la visite
adultes groupes
et
retraités
enfants
et
étudiants
tarif
famille
Centre 1 h 2 £ 1 £ 50 1 £ 5 £
Centre et
Newgrange
  3 £ 2 £ 1 £ 25 7 £ 50
Centre et
Know
  2 £ 1 £ 50 1 £ 5 £
Centre
Newgrange
et Knowth
  5 £ 3 £ 50 5 £ 12£50

 


 

L'aménagement du site dans le respect de l'esprit des lieux
 

Une conviction forte a présidé à l'intervention sur le site :
les aménagements doivent strictement
répondre aux objectifs de gestion et ne sont réalisés que lorsqu'il n'y a pas d'autres alternatives.


La structure et les moyens de gestion

La gestion du site est assurée par le National monuments and historie properties service (service d'État).

Outre le responsable du site, le site emploie 30 guides et 10 employés d'entretien.

Le budget de fonctionnement annuel de la Vallée de la Boyne s'élève à 3,20 MF. Le site ne dispose pas d'un budget propre : les recettes du site vont au budget général de l'État qui finance le budget de fonctionnement de la Vallée de la Boyne.

Avec la création du centre d'accueil et le développement de services d'accueil aux visiteurs, l'objectif est désormais d'équilibrer le fonctionnement. La politique est plutôt de minimiser les dépenses que de chercher à accroître les recettes. Ainsi, en échange du droit de passage dans leurs propriétés, l'État donne aux agriculteurs un droit d'usage dans ses propriétés.

Ou encore, plutôt que de demander un droit de concession élevé aucafé-restaurant pour la haute saison, il a été préféré de lui demander de rester ouvert toute l'année avec un bon niveau de prestation.

Données-clés sur le budget de gestion

-  budget annuel: 3,20 MF
- financement de la gestion : budget général de l'État.
Pas de budget propre.

Les gestionnaires

- organisme gestionnaire de la Vallée de la Boyne : National Monuments and Historie Properties
Service : service d'État, chargé de la gestion de tous les Parcs nationaux Irlandais, des monuments et de la vie sauvage. C'est à la fois un service de réglementation et de gestion opérationnelle.
- propriétaires: agriculteurs locaux. Le NMHPS ne possède que 5 % de la surface.


Les retombées économiques et le partenariat local
 

Elles sont sensibles au niveau des 40 emplois directs créés localement par le NMHPS (emplois proposés aux jeunes locaux pour une grande part).

La création du nouveau centre d'accueil, véritable « porte d'entrée » du site, a donné lieu à de nombreux débats, parfois conflictuels, entre le NMHPS et le milieu local.
Auparavant, les villages alentours ne tiraient que peu de bénéfice de la renommée du site et en avaient surtout les effets négatifs, les visiteurs venant juste en excursion d'une journée sans séjourner. Cependant l'accès aux différentes tombes se faisait à partir du village de Slane. La construction du centre d'accueil à 10 km de Slane a été vécu comme un court-circuitage du village. Au  démarrage, l'activité des commerces en a pâti, d'autant que le centre d'accueil dispose de différents services et d'un restaurant, faisant concurrence au commerce local.

Depuis, l'accroissement continu du nombre de visiteurs s'est accompagné d'un doublement du temps de séjour dans la région et devrait encore s'accroître. Avec le temps, les impacts positifs sont aujourd'hui reconnus. Enfin, la dynamique enclenchée a engagé l'État à réaliser des travaux de restauration dans le village.

Le centre d'accueil informe sur le village, son histoire et son patrimoine, sur les autres sites à visiter au travers d'une exposition. Par un accord avec le NMHPS, les commerçants du village peuvent offrir à leurs clients des réductions sur l'entrée du site de la Vallée de la Boyne.

L'ensemble du projet a été conçu dans le cadre d'un groupe de travail comprenant des représentants de l'État, des intérêts régionaux et locaux (les collectivités locales, le comité régional du tourisme, l'université de Dublin ... ). A également été créé un comité consultatif pour suivre le projet, comprenant des propriétaires locaux, des habitants, des commerçants ... ). En tout état de cause, le caractère privé du site oblige à des contacts et ajustements permanents avec les habitants, particulièrement les agriculteurs.

L'importance de la communication
« Je dois souligner que les stratégies adoptées ont beaucoup évolué durant la dizainle d'années qu'a duré l'établissement de notre plan de gestion. Durant cette période nous avons fait des erreurs, souvent changé d'orientation, et testé de nouvelles pistes. Sans doute la leçon la plus importante que nous avons apprise est l'importance vitale de la communication avec le grand public et surtout avec les populations locales ».
(Eugene Keane, National Monuments and Historie Properties Service, gestionnaire de la Vallée de la Boyne)


Conclusion

Le gestionnaire du site souligne que pour aboutir à des solurions aux problèmes délicats de conservation des vestiges induits par la visite, il a été nécessaire d'adopter une démarche de projet et de gestion globale et multidimensionnelle.

Une telle approche nécessite une concertation étendue et aussi beaucoup de compromis. Le service chargé de la gestion de la Boyne insiste sur l'importance de la formation des responsables de ses sites à des
techniques nouvelles : concertation locale, communication, socio-économie du tourisme.

Le cas de la Vallée de la Boyne est également inréressant à un autre titre : il montre qu'il est possible pour un organisme public de gérer un site archéologique sans qu'il en détienne pour autant la maîtrise foncière, les vestiges se trouvant sur des terrains privés, exploités par des agriculteurs.